Assassinés parce que chrétiens, parce que religieux, parce qu’ils n’avaient pas « obéi » aux ordres des Groupes islamistes armés qui voulaient contraindre tous les étrangers à quitter le pays.
Même si les circonstances de ces morts ne sont pas toujours établies, c’est bien parce qu’ils avaient choisi de rester, dans un choix personnel et communautaire, qu’ils furent tués. Nul n’oublie, et encore moins les postulateurs de la cause de béatification, qu’il y eut dans ces années noires de la guerre civile un nombre considérable d’Algériens, de tous les secteurs de la vie ce pays, eux aussi assassinés, ainsi qu’un grand nombre d’étrangers, dont des chrétiens. Ils ne sont pas oubliés dans la mémoire de l’Eglise.
Nous connaissons bien l’histoire et la personnalité des sept moines de Tibhirine, et celle de Mgr Pierre Claverie, évêque d’Oran (dont le Père Adrien Candiard a tiré une magnifique pièce, « Pierre et Mohamed »). L’Église fait aussi mémoire des quatre Pères Blancs français assassinés ensemble dans leur mission de Tizi‐Ouzou, de deux petites soeurs espagnoles tuées côte‐à‐côte à Bab‐el‐Oued, de deux autres petites Soeurs de Notre‐Dame‐des‐Apôtres mortes à Alger, d’une Petite Soeur de Jésus tuée à Kouba alors que sa compagne est grièvement blessée, et aussi, ce furent les premiers à mourir, du frère mariste Henri et de soeur Paul‐Hélène, tués l’un après l’autre dans la bibliothèque qu’ils faisaient vivre dans la Casbah d’Alger. Soeur Paul‐Hélène Saint‐Raymond était Petite Soeur de l’Assomption. Elle avait grandi à Neuilly où sa famille reste bien implantée. Elle a fait toute sa scolarité à Sainte‐Marie de Neuilly. Elle aurait 91 ans. Autant dire qu’elle a pu être la compagne ou la contemporaine de certains d’entre nous ou de nos parents. Quelques temps avant ces événements, elle avait répondu à l’Archevêque qui lui recommandait d’être prudente : « De toutes façons, nos vies sont déjà données ».
L’Église ne les a pas béatifiés en raison d’une pureté de vie exemplaire (il semble que chacun avait son caractère !), ou d’une piété à toute épreuve (on sait que le chemin spirituel de certains ne fut pas toujours simple). Mais, en ne cédant pas au chantage ou à la peur, en restant proches des personnes et d’un peuple qu’ils avaient découverts, aimés et servis, et dont ils avaient respecté la foi, en assumant les risques encourus, en pardonnant par avance à leur possible assassin, ils ont fait vivre l’Évangile, ils ont fait vivre l’Église en Algérie.
Alors, nous pouvons les prier, eux qui sont si proches de nous. Nous pouvons leur demander de nous inspirer quand nous aurons à vivre des choix ou des orientations difficiles.
Père Guy Rondepierre